28 février 2012

Jasper National Park


Il n'y a pas grand-chose à dire...

Les photos qui suivent ont été prises dans le Parc National de Jasper (Jasper National Park) dans les Rocheuses canadiennes, où je viens de passer deux jours. C'est magnifique.



26 février 2012

Au cœur des Rocheuses

Jasper. Après deux jours de train, me voici pour deux jours à Jasper, dans la province de l'Alberta. J'ai enfin atteint les Rocheuses, que j'ai prévu de longer jusqu'à Salt Lake City dans l'Utah aux Etats-Unis, avant de retrouver le Pacifique et San Francisco. J'ai à nouveau changé de fuseau horaire. Après celui de l'Alaska puis de la côte Pacifique, celui des Rocheuses est le troisième depuis mon arrivée sur le continent américain. J'ai désormais 8 heures d'écart avec la France. Et je retrouve avec joie un climat continental rigoureux, à base de neige et de froid. Après des températures positives, on est retombé dans les -10°C.

Le trajet en train est aussi beau que celui que j'avais effectué en Alaska (et dont vous pouvez revoir quelques photos). Pour les amateurs de train, comme a pu l'être mon grand-père, c'est un vrai plaisir. D'abord par sa lenteur. En quelques heures d'avion, on peut se retrouver à l'autre bout du monde. Mais là, à 50 ou 60 km/h de moyenne, on se réalise mieux la distance parcourue. On prend son temps. J'ai appris à être moins pressé. Finalement, qu'est-ce que deux heures de retard à l'arrivée le premier jour quand le trajet était déjà prévu pour en durer douze initialement ?

Il n'y a qu'une seule voie entre Prince Rupert et Jasper (et c'est la seule ligne dans le grand Ouest canadien en plus du Toronto-Vancouver). Cette voie unique est surtout utilisée par des trains de marchandises. L'accès au Pacifique est donc réduit. Ce qui explique les « embouteillages » en temps normal et la fermeture de la ligne quand un train déraille, comme en milieu de semaine. Une fois la voie rouverte, il a fallu faire passer tous ces trains qui patientaient. Du coup, notre petit train de passagers (deux wagons + une locomotive) ne pèse pas bien lourd financièrement et physiquement par rapport aux immenses trains de marchandises. Certains dépassent les 250 wagons, soit plus de trois kilomètres de long !! Quelques doublements de voie permettent de patienter le temps qu'un train passe dans l'autre sens.

Et puis c'est beau. La voiture panoramique permet de profiter de ces grandes vallées fluviales entourées de montagnes boisées d'épineux. La suite en images.


J'en profite aussi pour vous proposer des photos de Prince Rupert. Je n'aurais pas vu de rennes traversant la rue, mais de bien belles forêts, des arbres immenses et des torrents partout. Il faut dire qu'avec ce qu'il pleut...


Pour info, mais sans surprise, toutes les photos sont accessibles sur la page « Photos », y compris la galerie de portraits.

24 février 2012

PC Course

Arrivé en Alaska il y a un mois, j'ai fait escale deux semaines à Fairbanks. Ensuite, j'ai rallié Anchorage en train, où je suis resté dix jours. Enfin, quatre jours ferry m'ont permis de voyager dans le Sud-Est de l'Alaska.

Lundi, après quatre semaines en Alaska, et presque 2.500 km parcourus, j'ai débarqué à Prince Rupert. Cette ville de la province de Colombie britannique est située à l'extrême Nord de la côte Pacifique du Canada.

Mardi, j'ai passé une bonne partie de ma journée au bord de la route, le pouce levé. On m'avait tellement vanté la facilité de faire du stop au Canada. Mais même sous la pluie, pas une seule voiture n'a daigné s'arrêter.

Mercredi, j'ai voulu prendre le train. Impossible. La veille, un déraillement de train de marchandises (49 wagons impliqués) a bouché la voie. Toujours cette histoire de voyage et d'inattendu ! J'ai donc patienté deux jours de plus pour pouvoir espérer prendre un train vendredi.

Toujours voir le côté positif des choses : j'ai adoré ce séjour quatre fois plus long que prévu chez Sunflower. On a discuté de généalogie et de son futur voyage en France, on a cuisiné, on a randonné avec sa copine Laura, … Et je serai resté suffisamment longtemps à Prince Rupert pour avoir droit à deux heures de soleil hier en fin de journée. Et une matinée sans pluie aujourd'hui, avant que la neige ne fasse son apparition. Ne jamais être mauvaise langue !

Vendredi, la voie semble dégagée pour que mon train puisse passer. J'arriverai le soir à Prince George, à 750 km à l'Est. Je serai hébergé chez Darryl. Le lendemain matin, je reprends le train pour Jasper, situé en pleines Rocheuses, juste après la frontière avec la province de l'Alberta. Je gagne encore une heure.

Lundi matin, après deux jours d'arrêt chez Reece à Jasper, j'attraperai un train ou un bus pour Edmonton. Arrivée prévue le 27 février en fin de journée. Et pour moi, cela veut dire 24 heures d'avance sur l'itinéraire que j'avais prévu. Cet itinéraire deux fois plus court passait beaucoup plus au nord que celui que j'ai emprunté. Mais cela veut dire que malgré tout, j'ai réussi à plutôt bien gérer les aléas des transports.

Ceci dit, ne vendons pas la peau de l'ours avant de l'avoir tué ; Edmonton est encore à plus de 1 500 km d'ici !


22 février 2012

Prince Rupert

« L'herbe est toujours plus verte ailleurs ». Ça dépend !... Ici à Prince Rupert, elle est particulièrement verte. Et pour cause. Dans cette région de la côte Nord-Ouest du Canada, il tombe annuellement 2 590 mm de précipitations. En soi, moi non plus ça ne me parle pas beaucoup. Mais quand on sait que c'est ce qui tombe sur Paris en quatre ans, là on commence à réaliser. Ce triste record vaut donc à Prince Rupert le titre de ville la plus humide du Canada. Certains disent même qu'elle se place sur le podium au niveau mondial. Pour ma part je me demande surtout comment deux autres villes pourraient être encore plus humide. C'est mon quatrième jour dans la région et je n'ai pas encore vu la pluie s'arrêter. Même pas une pause. Rien. Il pleut sans discontinuer.

Par voie de conséquence, le soleil ne brille pas plus de 1 230 heures par an, soit l'équivalent d'une centaine de jours (un peu plus de trois mois en cumulé). Donc deuxième record : c'est la ville la moins ensoleillée du Canada. Déprimant ? Oui. Enfin les premiers jours. Mais il est vrai que les habitants sont quand même affectés. D'abord physiologiquement par le manque de vitamine D (hormone synthétisée par le corps sous l'action des rayons UV de la lumière). Une carence en vitamine D peut provoquer des maladies assez graves comme le diabète, le cancer ou encore la démence. Et puis psychologiquement, l'horizon est toujours bouché, le ciel très bas, et le froid humide mordant. Pas évident !

Donc au sens propre, le proverbe a tort. Il demeure adapté au sens figuré. Mais heureusement, pour se réchauffer, je rencontre des personnes particulièrement chaleureuses. Je loge actuellement chez Sunflower (un prénom décalé pour la région !), une femme assez active. Comme beaucoup ici, elle travaille dans l'industrie de la pêche. Elle est en charge de l'inspection des différents retours de pêche pour s'assurer que les bateaux respectent leurs quotas. Elle est également très investie dans deux associations : l'une musicale, l'autre de lutte contre la pauvreté (activités extra-scolaires pour les enfants, accompagnement des parents en difficulté). Originaire du Québec, elle est particulièrement francophile et s'envolera pour passer un mois en France avec sa fille et son petit-fils en juillet. On discute donc aussi des différents endroits qu'ils prévoient de visiter.

La région est très belle, des petites îles partout encore, des forêts, des montagnes, la vie sauvage. Des rennes traversent au passage piéton en pleine ville, paraît-il même ! Je retourne me promener. Il semblerait que le ciel s'éclaircisse !...



20 février 2012

The Inside Passage

Oui, on peut dire que j'ai eu de la chance. Les conditions météo qui ont retardé d'une journée le départ de mon ferry a accru considérablement le risque d'avalanches sur la route Anchorage-Whittier que j'ai à nouveau emprunté avec Vitor jeudi. Et quand on sait que ce ferry était le dernier avant le mois d'avril, je n'ai pas besoin de vous dire que je me suis contenté d'avoir pu finalement embarquer avec 24 heures de retard !

Jeudi 16 au soir. Whittier. Le temps s'est arrangé. Effectivement, c'est de la neige fondue qui tombe, il ne fait que -2°C et le vent ne souffle plus qu'à 100 km/h ! Rapides adieux à Vitor. Je me réfugie chez les gardes-côtes le temps que le terminal des ferrys ouvre. Rapide photo du port de plaisance. Une pensée pour mes amis et cousins marins, et mon frérot bien sûr !


Ce ferry est un condensé de l'Alaska : immense mais vide ! Nous sommes 40 passagers (pour le dernier tronçon, on ne sera plus que 8) pour 60 membres d'équipage. L'un d'eux avec qui je discute me recommande un petit coin tranquille pour dormir. Je n'ai pas pris de cabine. J'ai bien fait, ça ne valait pas le coup. On dort très bien sur les banquettes et il y a des douches dans les parties communes.


Petit point sur l'itinéraire avec cette carte que je vous ai concoctée. On part donc de Whittier, direction Yakutat où nous faisons escale le lendemain soir, puis Juneau le surlendemain (samedi) après-midi. Ketchikan sera en vue le dimanche en fin de journée. Et je toucherai définitivement terre lundi matin à Prince Rupert. En tout, nous aurons parcouru 1.700 kilomètres à la vitesse moyenne de 15 nœuds (soit une petite trentaine de kilomètres/heure).

La première partie du trajet, nous naviguons dans le Golfe d'Alaska. C'est le Pacifique, en fait. Mais bon, Pacifique, Pacifique, faut vite le dire ! Ça bouge pas mal quand même. Mais le temps s'est levé. À part l'océan à perte de vue, le seul repère terrestre en vue sera le cap Saint Elias (Cape St. Elias, avec l'orthographe anglaise, sur la carte) photographié ci-dessous. Ni icebergs ni baleines en vue. Il est encore trop tôt dans la saison. Dommage !


Au réveil le deuxième jour, nous apercevons au loin l'entrée (ou la sortie d'ailleurs) de l'Inside Passage. En français, ça donne « Passage intérieur ». Très spirituel tout ça. Il faut dire que quand on voit se rapprocher ces côtes massives et sombres, il n'y a guère d'autres options que de redécouvrir un semblant de spiritualité et prier pour que tout se passe bien ! Mais en fait, c'est juste magnifique.

Plus on se rapproche des côtes, plus ces paysages inquiétants se dévoilent derrière le brouillard et les nuages. Un peu comme au théâtre où les décors apparaissent les uns après les autres. Une fois dans l'Inside Passage, le vent tombe, la mer se calme. Mais le temps est toujours assez changeant. On ne sait pas très bien par quel miracle le soleil arrive à percer parfois ce ciel si chargé et si bas. Ce jeu de cache-cache offre au photographe une palette incroyable de couleurs, de lumière, de contre-jour. Un régal pour les yeux et pour la lentille de mon Canon.


Le troisième jour, le temps se fait plus doux. J'ai revu la pluie. Une première depuis mon départ ! C'est signe que le thermomètre est repassé au dessus de 0°C. La pluie. Il n'arrête pas de pleuvoir dans ce coin du Sud-Est de l'Alaska. Ils ont des forêts magnifiques ; et pour cause ! Mais c'est déprimant. Et même si le thermomètre est remonté, cette humidité vous glace sur place. Autant les courtes journées, le froid polaire, la neige, le vent et la glace, je peux. Mais contre l'humidité, c'est très difficile de lutter. Je repars volontiers dans le nord.

Nous continuons à slalomer entre les îles. Certaines sont presque aussi grandes que le Liban, mais encore une fois, tellement peu peuplées. Ici beaucoup de villages sont des communautés autochtones, des communautés qui pré-existaient à l'arrivée des Russes puis des Américains. Ce sont les Tlingits. Adossés aux montagnes, tournés vers l'océan, ils vivent essentiellement du bois et de la pêche depuis des millénaires, dans le Passage intérieur ou dans le Golfe d'Alaska. Ils ont toujours su rester à distance de la "puissance" dominante du moment. Ils sont aujourd'hui rattachés à l'Alaska. C'est pour ça qu'on comprend ce petit décrochage dans la frontière entre l'Alaska et le Canada.

A chacune des trois escales, certains montent, d'autres descendent. J'ai ainsi rencontré une petite famille qui déménageait du Nord vers le Sud (de l'Alaska). Un jeune qui rentrait dans son village de l'autre côté de la grande île du sud. Deux Australiens en voyage. Deux jeunes qui vont à Seattle pour ensuite revenir en voiture en Alaska, une espèce de course, enfin j'ai pas tout compris. Et Jim, la soixantaine, qui descend à Prince Rupert comme moi et poursuit ensuite en voiture jusqu'à Seattle où il doit retrouver des bateaux qu'il doit convoyer.

À l'escale de Ketchikan, Maggie, membre de l'équipage, nous emmène (Jim, les Australiens, les deux jeunes et leur course de voiture, et moi). Elle a déménagé récemment dans le coin. Pendant plus de trois heures, au pas de charge, elle va nous faire visiter la ville aux trois cent mille totems. Oui, ces totems en bois comme dans notre imaginaire collectif (cf. photos). En trois heures, on n'a eu le temps d'en voir qu'une cinquantaine, mais ça laisse imaginer leur nombre en tout. Ketchikan, c'est très pittoresque (et toujours cette pluie !). Ca ressemble à cette ville qu'on aperçoit dans le film Croc-Blanc, à l'époque de la ruée vers l'or. Ces maisons en bois, ces devantures si particulières du grand ouest américain. Il faisait nuit mais il y a une photo quand même.

Arrivé ce matin à Prince Rupert. Il pleut toujours. Je reste une journée et je continue vers l'est. Ainsi s'achève mon périple de quatre semaines en Alaska qui m'aura enchanté. Cela augure bien de la suite. Je ferai peut-être un petit résumé de tous les épisodes de la série pour ceux qui en auraient loupé un ou deux.


Quelques précisions sur les dernières photos d'Alaska, que vous trouverez ci-dessous. Vous aurez du mal à le croire peut-être mais elles sont garanties sans filtre. Couleurs et luminosité sont fidèles à la réalité. La première photo est donc une vue du port de plaisance de Whittier. La seconde, le cap St Elias. Les aigles chauves ont été pris en photo lors de l'escale à Juneau. On a croisé un ferry similaire pour vous donner une idée du bateau. Le reste est sans commentaire.

Si, juste un dernier. La photographie est une passion pour beaucoup ; c'est mon cas. Certains ont même la chance de pouvoir en vivre. Comme toute œuvre culturelle, on peut acheter une photo pour l'encadrer, pour l'offrir, pour la partager et la faire vivre. Pour ceux qui souhaiteraient en faire de même avec mes photos, ce serait aussi une façon de contribuer à la réalisation de ce projet. Pour plus d'info, vous pouvez m'écrire ; mes contacts sont dans la page « Qui suis-je ? ».

« I am an Earth warrior »

Sur son vélo, on peut lire « Burn fat, not oil » (« Brûle de la graisse, pas du pétrole »). Il est 7h30 du matin, il fait encore nuit noire et il pédale. Ce matin, il va d'abord travailler puis cet après-midi, il ira en cours. Mais qui est 'il' ? Ici, tout le monde l'appelle Victor, mais son vrai nom est Vitor.

Vitor est brésilien. Il travaille et étudie à l'Université d'Alaska – Anchorage (UAA). Arrivé en septembre 2011, il suit un master de protection de l'environnement et développement durable. Mais qu'est-ce qui l'a poussé à venir de Curitiba (au Brésil) à Anchorage ? Il est où l'intérêt de perdre jusqu'à 40°C pendant une bonne partie de l'année ? Pourquoi ? Pour quoi ?


Au Brésil, Vitor travaillait dans la finance. Fatigué par la mentalité de ses congénères, il débute en janvier 2011 un voyage de 6 mois à travers les Etats-Unis. Son but est de rencontrer les 50 personnes qui sont listées comme ayant le plus d'influence pour changer le monde. Il part à la recherche d'inspiration mais aussi de solutions concrètes pour construire un monde meilleur. De Los Angeles à Seattle, en passant par Nashville, New York ou encore Chicago, il va en rencontrer une vingtaine : professeurs, associatifs, politiques, photographes, etc.

Puis l'envie d'accroître ses connaissances le pousse à envoyer sa candidature à l'Université d'Alaska – Anchorage (UAA) où il est reçu en septembre 2011. Il étudie donc l'après-midi et le soir. Le matin, il travaille pour arrondir les fins de mois. Il est employé au Bureau du Développement durable (Office of Sustainability) de l'Université. Il fait partie de l'équipe recyclage. Elle collecte tous les matériaux recyclables dans les différents bâtiments de cet immense campus. Ingrat ? Il ne trouve pas. Le matin où je l'ai accompagné dans sa tournée, il m'explique que c'est d'abord sa façon de s'engager. C'est aussi pour lui le moyen idéal d'être au contact des étudiants et des profs et d'accroître chez eux la prise de conscience de la nécessité de bien trier et de recycler. Et il ne fait pas que ça. Le Bureau est plus largement chargé de proposer des solutions pour que l'UAA s'améliore dans tous les domaines possibles du développement durable et de mettre en pratique celles déjà adoptées.

À la fac, Vitor est aussi très impliqué dans la vie étudiante. En tant que "sénateur", il siège au conseil d'administration de l'université. Il s'est fait élire alors que ça ne fait pas encore six mois qu'il est là. Au CA, il milite pour que la fac se donne les moyens d'être classée au niveau mondial parmi les 20 universités les plus en pointe sur le développement durable. Il y a encore beaucoup à faire, et pas uniquement en termes de recyclage ou d'économies d'énergie. Mais l'important c'est de lancer le mouvement. Il est persuadé que c'est par l'exemple que l'UAA fera également bouger d'autres universités aux Etats-Unis. Et les étudiants sont ceux qui seront aux responsabilités demain. Alors autant commencer dès aujourd'hui à prendre soin de notre planète.

Comme il m'a hébergé quasiment une semaine, nous avons pu pas mal discuter, en particulier du niveau de prise de conscience des Alaskains sur le changement climatique ou le développement durable. Il a confirmé ce que j'avais déjà perçu et entendu ailleurs : ce niveau est faible. C'est assez triste quand on sait que l'Alaska est une des régions du monde qui paie et paiera le plus cher les conséquences du changement climatique. Au lieu de ça, l'Alaska continue à forer pour pomper davantage de pétrole et de gaz, ne développe aucune source d'énergie alternative et renouvelable, continue l'expansion de ses villes dans lesquelles les voitures individuelles sont le seul moyen de transport.

Qu'est-ce qui le fait rester optimiste malgré tout ? Il croit dur comme fer que nous avons tous, à notre niveau, une certaine responsabilité. Nous avons la possibilité de nous investir dans des associations, dans des comités locaux (conseil de quartier, etc.), nous impliquer en politique, repenser nos habitudes de consommation et notre interaction avec la nature, etc. Donc nous pouvons tous contribuer à faire de la Terre un monde meilleur. Et Vitor a bien l'intention de rester en Alaska jusqu'à ce qu'il ait tout essayé pour ça.

Il habite une maison en colocation. Les discussions sont souvent assez animées ! Il ne cherche pas à convaincre ses colocataires ou leur faire gober tout rond une vérité ou une autre. Il essaie juste de les amener à réfléchir à leur impact au quotidien sur l'environnement et à leur responsabilité. Et il a toujours autant d'énergie pour s'amuser ou sortir avec ses copains. C'est quelqu'un d'assez drôle. Ce n'est pas un environnementaliste ennuyeux. Comme l'a qualifié une personne qu'il a rencontrée sur la route l'an dernier, Vitor est un combattant de la planète, « an Earth warrior ». Et je pense que ce n'est pas le seul que je serai amené à rencontrer. C'est juste le premier.

19 février 2012

L'Alaska et l'environnement

Ça fait un moment que je vous devais cet article. Le voici enfin ! [Merci Ségo pour ta patience ;-)] Ce que j'ai vu et vécu en Alaska m'amène donc à vous proposer cette analyse, sans prétention. Je vais tâcher d'éviter une approche trop simpliste, ou au contraire trop technique.

L'environnement. Vaste sujet. Mais de quoi on parle ? Commençons par parler de la nature. L'Alaska est un territoire immense (trois fois la France) et très peu peuplé : environ 720.000 habitants. C'est à peine plus que le Luxembourg ; c'est une fois et demie Toulouse. Quand on quitte une ville ici, on est donc très rapidement "au milieu de nulle part", comme le bon citadin que je suis a l'habitude de dire. Ce nulle part, c'est la nature, pleine et entière. Les conditions climatiques et géographiques peuvent renforcer une étrange impression de bout du monde, surtout quand la météo n'est pas bonne et que la luminosité est réduite en hiver. Mais l'Alaska, c'est aussi un concentré de tout ce qu'on peut trouver sur Terre : chaînes de montagnes, volcans, kilomètres de côtes (plus que celles des 49 autres Etats cumulés), immenses forêts, plaines, fleuves, fjords, tundra. Ne manquent à l'appel que la plage et ses cocotiers.

Devant cette immensité, on ne peut que se sentir tout petit. Comme en Laponie (Nord de la Scandinavie), on ne peut qu'être proche de la nature. Pourtant ici, ce n'est pas toujours le sentiment que j'en ai eu. D'abord parce qu'on est aux Etats-Unis, sans doute. Et que l'économie est plus importante que tout. Ensuite parce que les Etats-Unis et l'Alaska en particulier sont des terres de liberté : « J'ai le droit de faire ce que je veux ». Enfin parce qu'on peut entendre ici ou là : « Après tout, l'Alaska est tellement grand qu'on peut bien polluer un peu localement avec quelques puits de pétrole ou une centrale électrique qui fonctionne au charbon. Ça ne va pas changer la face du monde ! ». Malheureusement si, ou en tout cas, ça y contribue.

Peu semblent prendre conscience des chiffres qui révèlent que l'Alaska est une des régions du monde les plus touchées par le changement climatique et des conséquences que cela peut avoir. On estime que l'Alaska se réchauffe 4 fois plus que le reste du monde. En 50 ans, la moyenne des températures annuelles a déjà augmenté de plus de 2°C alors que dans le même temps, l'ensemble de la planète s'est réchauffée en moyenne de 0,5°C. La NASA elle-même le confirme dans un récent rapport.

Ici, qui dit réchauffement climatique, dit aussi fonte de la calotte polaire. Jusqu'alors, quelque soit la saison, l'océan Arctique est totalement ou partiellement gelé. Mais on prévoit qu'à partir de 2013, l'Arctique pourrait être libéré des glaces durant l'été. Et une fonte de la calotte polaire conjuguée à d'autres phénomènes entraine une élévation du niveau de la mer, particulièrement dramatique quand on sait que la grande majorité des populations habite sur la côte.

De même, en plusieurs régions le permafrost fond. Le permafrost (ou pergélisol), c'est tout simplement un sol et un sous-sol qui restent gelés en toute saison (perma – permanent ; frost – gelé). C'est le cas d'une bonne partie de l'Alaska, comme en Sibérie ou dans le Nord canadien. Or s'il fond, c'est d'abord problématique pour toutes les infrastructures humaines qui reposent dessus (bâtiments, réseaux routiers, tuyaux enterrés, etc.) et qui s'effondrent. Mais surtout, la fonte du permafrost libère une quantité phénoménale de méthane (CH4) qui est, pour faire simple, un gaz 23 fois plus dangereux que le CO2 en termes d'effet de serre. Et le permafrost sous-marin est également touché. La libération du méthane acidifie davantage encore les océans, qui en deviennent toxiques pour les poissons, mammifères marins et tout ce qui vit sous l'eau.

Pas très réjouissant tout ça ! En effet, j'en suis désolé, mais c'est la réalité. De ce que j'ai pu en comprendre de mes discussions avec certains, ce qui est plus triste encore, c'est que peu s'intéressent à ces problèmes. Il y a certes des organisations environnementalistes (tel le WWF ou Greenpeace). Mais il semble que beaucoup travaillent à la protection des animaux. Peu sont celles qui travaillent sur le problème dans sa globalité. Et face aux lobbys pétroliers, elles ne pèsent pas grand-chose. Malheureusement, je n'ai pas pu en rencontrer pour étayer mes propos, donc j'en resterai là.

La situation n'est pas désespérée pour autant. On peut espérer revivre des périodes telles qu'a connu le pays à une époque encore récente (disons les années 1960-1970). De nombreuses initiatives politiques avaient alors permis de poser les bases juridiques de la protection de l'environnement aux Etats-Unis. En particulier, cela avait résulté en un vaste mouvement de création de parcs nationaux, de réserves de vie sauvage, etc, à travers tous les Etats-Unis. Ces différentes "terres publiques" – "public lands" en anglais – sont gérées au niveau fédéral ou au niveau local (Etat, comté ou municipalité). Elles ont des missions assez variées qui vont de la protection de la faune et de la flore à la gestion et à l'aménagement du territoire. Sur ces immenses territoires, toute activité humaine comme la pêche, la chasse, ou encore l'exploitation des ressources est interdite, ou très restreinte et très encadrée. C'est ainsi, par exemple, que des réserves d'hydrocarbures du Nord ne peuvent être exploitées car situées dans ces zones protégées. La question est toujours de savoir combien de temps encore elles résisteront aux lobbys pétroliers.

Par ailleurs, l'Alaska dispose de ressources particulièrement renouvelables qui pourraient être utilisées si le tout-pétrole était abandonné. Dans le Sud et le Sud-Ouest, région particulièrement volcanique comme je vous l'avais dit, c'est l'énergie géothermique qui peut être utilisée pour chauffer les maisons ou même produire de l'électricité. Le long des côtes, et particulièrement encore dans les îles Aléoutiennes dans le Sud-Ouest, le vent souffle abondamment toute l'année. L'éolien pourrait être développer très rapidement. Le solaire également est une ressource inépuisable, surtout en été dans le Nord où le soleil brille une très grande partie de la journée. Dans le Sud-Est très humide, c'est l'énergie hydroélectrique qui peut être utilisée. L'océan lui-même, dans l'Ouest, avec sa force marée-motrice, la puissance de ses vagues ou encore par géothermie peut constituer un apport non-négligeable d'énergie.

À l'approche de l'élection présidentielle américaine (qui aura lieu le 6 novembre prochain), le sujet du réchauffement climatique ou de l'utilisation d'énergies renouvelables contre les énergies fossiles peut prendre de l'importance. Deux visions s'opposent : les uns plutôt partisans du développement économique de l'Alaska, qui passerait exclusivement par l'exploitation de ses ressources minières et pétrolières ; les autres plutôt favorables à une évolution des modes de vie et une plus grande proximité ou interaction entre la civilisation humaine et l'environnement qui l'entoure. Pour l'instant, même en mettant l'argument du coût du réchauffement climatique en balance avec le gain financier que représenterait l'utilisation de ces ressources gratuites et renouvelables, trop peu sont convaincus de l'importance de changer le système et d'adapter un peu plus encore son mode de vie aux énergies renouvelables disponibles. Aux Etats-Unis aussi la transition vers une économie verte n'est pas pour maintenant.

J'ai rencontré de nombreuses personnes qui, par intérêt ou professionnellement, travaillent sur ces questions environnementales (à commencer par tous mes hôtes jusqu'à présent). Mais je n'ai pas pu rencontrer de personnes travaillant dans des ONG de protection de l'environnement. De même, j'ai eu très peu de contacts avec des personnes issues des communautés autochtones/indigènes implantées en grande partie dans l'Ouest et dans le Sud-Est. C'est vraiment dommage parce que j'en aurais beaucoup appris sur leur rapport à la nature.

Je quitte un Etat plein de contradictions, aux richesses inestimables et aux motivations très mercantiles. Je me garde bien de tout jugement définitif. Je n'ai eu qu'un aperçu parcellaire de la situation. Mais un aperçu quand même … et vous l'avez lu jusqu'au bout. Bravo !

16 février 2012

PC Course

« Rien n'est plus propice qu'un voyage pour sonder tous les aspects de l'imprévu ». Aujourd'hui je ne pouvais que faire mienne cette citation de J.R. Boudou.

Je me suis d'abord laissé convaincre par Vitor, qui m'héberge en ce moment, d'abandonner le stop. À la place il m'a proposé de me conduire à Whittier. Avec l'essence à ma charge, ça restait le moyen le plus sûr et le moins coûteux.


Pour accéder à Whittier, il nous faut aller au fond de la baie d'Anchorage, le Cook Inlet. Puis on emprunte un tunnel (le plus long tunnel combiné route-rail d'Amérique du Nord !), pour se retrouver dans une autre baie, le Prince William Sound, où se situe Whittier. Le tout fait une centaine de kilomètres.

Mais c'était sans compter les conditions météo qui, à chaque dizaine de kilomètres, empiraient. De plus en plus de vent, de neige mélangée à de la pluie, de givre sur la route. Arrivé devant le tunnel, on nous prévient que les conditions météo de l'autre côté sont pires encore. Le ferry n'est même pas parti du port précédent l'escale de Whittier. Pas beaucoup plus d'infos.

Rapide tour d'horizon des possibilités. Pas d'hébergement à moins de 100 $ à Whittier. Même pas sûr que le bateau parte le lendemain. C'est vite vu, on fait demi-tour. À Anchorage, je consulte mes mails. La traversée n'est pas annulée. Nouvel embarquement prévu demain à 21 heures (= vendredi matin en France). En attendant, on s'est bien marré sur la route et on a pu s'en mettre plein la vue encore de ces paysages magnifiques : la route serpente le long de la baie à moitié gelée et les montagnes qui tombent quasiment à pic.





15 février 2012

Anecdotes anchorageoises

Je pense qu'anchorageois est un néologisme. Par contre, pour ceux qui se posaient la question sans oser demander, voici comment on prononce le nom de la ville : anne-ko-redge. Et puis pour ceux qui ne s'étaient pas posés la question, ça fait toujours meilleur effet de ne pas se tromper. Au passage, en anglais, anchorage signifie ancrage ou mouillage.

La neige est retombée en quantité durant le week-end. A la récré, impossible de jouer aux billes évidemment. Alors, même si ce ne sont pas les pentes de San Francisco, les enfants dévalent la cour en luge pendant la récréation. Et pour les adultes, le week-end, on chasse un peu la neige du lac et on peut faire du patin à glace dessus. Tout comme on peut faire du vélo sur les sentiers ou les trottoirs, avec des pneus super larges et cloutés.

Et qui dit neige, dit déneigement. Pour ça, les autorités locales disposent d'un véritable arsenal de guerre : les chasses-neige. Et croyez-moi, ce ne sont pas des Micro Machines ! (Amis collégiens, si vous ne connaissez pas ces jouets d'un autre siècle, je vous invite à faire une recherche avec l'aide de votre prof d'histoire).

Anchorage, c'est encore une ville où on trouve des panneaux de signalisation assez étranges. Vous en aurez aperçu certains dans la sélection de photos sur Anchorage. Voici quelques traductions pour les non-anglophones. « Please don't drink and drive » = « S'il vous plait ne buvez pas en conduisant ». « Save a brain, wear a bicycle helmet » = « Sauvez un cerveau, portez un casque de cycliste ». « Drug Free School Zone », non, ça ne veut pas dire « drogue gratuite », mais bien zone sans drogue car école à proximité. Rassurez-vous, je ne crois pas que ça implique qu'en dehors de ces zones, la consommation de drogue soit légale.

Hier soir, avec mon hôte Vitor et deux de ses amis, nous sommes allés au cinéma. Je suis toujours aussi fan de ciné, même en voyage. Ou surtout en voyage. C'est une autre approche, une autre programmation. C'était donc mon troisième film. Après Melancholia (long et étrange) et Big Miracle (sur le sauvetage en 1988 de trois baleines prises dans les glaces dans le Nord de l'Alaska), j'ai donc vu Le Havre cette semaine. Assez rigolo. Amateurs d'humour décalé, je vous le recommande.

Nous sommes encore le 14 février ici. Et tout le monde se souhaite la Saint-Valentin. C'est assez étrange comme concept. Evidemment en France, on va faire un effort pour être gentil avec son/sa partenaire et offrir un cadeau … ou pas, d'ailleurs ! Mais ici c'est la frénésie, voire la surenchère. Et partout on entend « Happy Valentine's Day ! » comme on entendrait des « Happy New Year ! » le 1er janvier. #TooMuch

Enfin, rapide description de là où je loge actuellement. C'est en fait une « cabin », sorte de petite cabane/mini-chalet dans le jardin d'une maison. C'est un peu l'auberge espagnole, avec pas mal de personnes qui habitent la maison. Et Vitor s'est donc installé dans la cabin qu'il a aménagé à son goût. L'inconvénient, c'est qu'elle ne ferme que de l'extérieur. Et machinalement, hier matin, il est parti … en fermant la cabin. Je suis donc resté toute la journée enfermé. Pas d'ordi (resté dans la maison) donc pas d'internet, pas de téléphone, personne pour m'ouvrir. J'ai donc lu pour patienter la bonne dizaine d'heures avant qu'il ne revienne de la fac. Vitor était un peu gêné, je crevais de faim, mais ça nous a bien faire rire au final. Et après tout, je ne suis pas à une journée près !

Voilà pour Anchorage. Demain matin 15 février (ce soir pour vous), je prends la route de Whittier où m'attend mon ferry qui partira à minuit précises. Arrivée prévue à Prince Rupert dimanche 19, à 6 heures du matin. J'avancerai alors ma montre d'une heure ; le décalage horaire avec la France se réduira à 9 heures. D'ici là probablement pas d'accès à internet. Alors bonnes vacances à ceux qui en ont !

13 février 2012

La vie au quotidien à Anchorage

Anchorage, c'est d'abord pour moi un très vieux souvenir de cours de géo de primaire. J'ai toujours associé cette ville à cette contrée lointaine, l'Alaska. Bien sûr, les années passant, s'est amplifié mon petit côté “Rain-Man des capitales du monde” (oui, j'avoue pouvoir citer et situer un bon nombre d'entre elles, comme certains peuvent citer les saints du calendrier). Et c'est ainsi que j'ai appris qu'Anchorage n'est pas la capitale de l'Alaska.


Certes, Anchorage est de loin la plus importante ville d'Alaska : 290.000 habitants (375.000 si on prend l'agglomération). C'est la moitié de la population totale de l'Alaska (cf. article sur l'Alaska). Cette ville toute récente n'existait pas en 1906 quand a été choisie Juneau pour capitale de l'Alaska. Malgré tout certains continuent de poser la question d'un déplacement de la capitale de Juneau à Anchorage.

Histoire

La ville s'est donc développée très récemment. Les constructeurs de la ligne de train (cf. article précédent sur le train du bout du monde) s'installent en 1914, dans ce qui deviendra vraiment Anchorage en 1920. Rapidement la ville devient une plaque tournante du trafic aérien transpolaire. Les avions transportant des marchandises par le Pôle Nord, en provenance d'Europe et à destination d'Asie (et inversement), faisaient escale à Anchorage. Encore aujourd'hui, il y a des vols réguliers en été entre Anchorage et Francfort en Allemagne : huit heures seulement en survolant le Pôle Nord (c'est la route la plus directe).

Au moment de la Seconde Guerre mondiale, le développement de la vile est étroitement lié à l'installation de l'une des plus importantes bases militaires des Etats-Unis (US Army + US Air Force). Elle servira de base arrière pour la guerre contre le Japon jusqu'en 1945 et restera ensuite très active pendant la Guerre froide vu sa proximité avec l'URSS. Enfin la découverte du pétrole dans les années 1960 et la construction du pipeline (qui transporte le pétrole depuis les régions arctiques vers la région d'Anchorage où il est ensuite raffiné et transporté par bateau) va achever son boom démographique. Ce développement trop rapide aura des conséquences sur l'urbanisme comme on le verra ensuite.


Le 27 mars 1964, à 17h36 précises, Anchorage est touché de plein fouet par un important tremblement de terre. Survenu le Vendredi Saint, il est surnommé "Good Friday Earthquake". Avec une magnitude de 9,2 sur l'échelle de Richter, il se classe entre celui de Valdivia au Chili en 1960 (le plus important séisme jamais enregistré) et celui de Sumatra en 2004, suivi du tsunami qui a dévasté l'océan Indien. Ce séisme, même s'il n'a fait "que" 143 victimes, reste très ancré dans la mémoire collective. L'Alaska, situé dans une région hautement sismique (la fameuse ceinture de feu du Pacifique), tremble régulièrement. Des secousses plus ou moins fortes sont enregistrées toutes les semaines.

Urbanisme

Qu'on se le dise, la ville est assez moche. Certes, elle a été détruite en bonne partie par le tremblement de terre de 1964, mais elle s'est surtout développée en dépit de règles d'urbanisme élémentaires. Le gros essor de la ville s'est produit après la Seconde Guerre mondiale, à une époque où l'Alaska n'était pas encore un Etat des Etats-Unis et où les affaires étaient principalement gérées par la mafia locale. C'était un peu le Far West.


Du coup, la ville est très étendue, s'est construite sur des kilomètres carrés de marécages, de sous-sols argileux, etc. Au prochain tremblement de terre important, beaucoup craignent que de nombreux quartiers disparaissent purement et simplement, littéralement engloutis.

Moins attrayante que Fairbanks, la ville est composée d'un centre-ville avec les sièges sociaux des principales compagnies pétrolières de la région. Des quartiers résidentiels. Des zones commerciales immenses à en donner la nausée.

En revanche, la ville, située au fond d'une baie qui donne sur le Pacifique, est entourée de montagne. Une subtile synthèse entre Corse et Pôle Nord. Le cadre magnifique compense donc largement le manque de charme de la ville.


Déplacement

Commençons par le positif. La ville a développé un petit réseau de pistes qui servent à la fois au ski de fond, à la marche, au vélo (même l'hiver, avec des pneus cloutés – n'est-ce pas Marion et Virgile), etc. Et pour les avoir arpentées, elles sont très agréables, car vous évitent de vous promener le long d'axes routiers, très empruntés. Et la plupart de ces pistes conduisent aux différents parcs que contient la ville. Aussi, très régulièrement, en pleine ville, on peut croiser des élans/orignaux (je ne fais pas encore la différence) voire des aigles chauves. Du fait de l'activité humaine, ce symbole des Etats-Unis n'est plus visible qu'en Alaska et en Floride.



La voiture, là encore, est rendue indispensable par les distances. Par exemple, le zoo de la ville se situe à plus de 16 km du centre-ville, mais on est toujours à Anchorage. Il n'y a que trop peu de transports en commun. Donc tout le monde utilise sa voiture. Et comme tout le monde a une voiture, pourquoi développer les transports en commun ? Vous voyez, c'est un vrai cercle vicieux.


Et pour quitter la ville en hiver, il n'y a pas beaucoup d'options : le train ne circule que vers Fairbanks, les lignes de bus inter-cités ne fonctionnent pas, les ferrys ne partent pas d'Anchorage. Vous l'aurez compris, pour le voyageur, c'est la galère ! (cf. article précédent)

Certes, il y a l'avion. L'avion est le moyen le plus utilisé pour faire des longues distances dans ce pays où le réseau routier n'est développé que dans le quart sud-est. Il sert aux sociétés d'exploitation pétrolière qui font régulièrement la navette entre Anchorage et les lieux d'extraction, souvent situés à plus de 1300 km, sur la côte Arctique. Par ailleurs, c'est le seul moyen de transport pour toutes les communautés situées à l'ouest d'un axe Anchorage-Fairbanks qui ne sont pas reliées par la route au reste du pays.


Et pour le reste des photos :



10 février 2012

PC Course

Un petit point d'étape. Je suis donc arrivé à Anchorage dimanche 5 au soir. Article et photo à suivre ce week-end ou en début de semaine prochaine.

Anchorage est situé sur la côte Pacifique (cf. carte en fin d'article). De là, comment poursuivre vers le Sud ? Il n'y a pas de transport en commun par la route possible. Ensuite, je repousse toujours au maximum l'option avion. Il n'y a plus de train. Le ski, les rollers ou le vélo sont toujours exclus. Et je n'ai toujours pas de voiture.

Il nous reste donc le stop. Très aléatoire. Ce serait pour aller à Whitehorse (Territoire du Yukon, au Canada). Oui, c'est bien la ville d'arrivée de la Yukon Quest. Bonne mémoire ! Mais c'est à 1200 km par la route et je me retrouve au milieu de nulle part si je ne peux pas les faire d'une traite. Et Whitehorse est une petite ville elle-même paumée au milieu de nulle part. Il y a un sacré bout de chemin avant Prince George, en Colombie Britannique (Canada, toujours) puis Edmonton (en Alberta, Canada).

J'ai oublié de mentionner que la nage était elle aussi exclue. Mais j'ai réussi à dégoter un trajet en ferry ! Bon, ça m'a coûté un bras, mais après tout j'aurai surtout besoin de mes jambes pour marcher quand le climat et la topographie seront plus propices. Mes douze heures de train du week-end dernier seront du pipi de chat à côté des 78 heures de navigation qui m'attendent. Je partirai donc dans la nuit de mercredi à jeudi pour arriver dimanche matin à Prince Rupert (Colombie Britannique, Canada). De là, je pourrai continuer par la route jusqu'à Prince George, précédemment citée.

J'embarquerai en fait de Whittier. Oui, il faut encore que je trouve un moyen de m'y rendre ! Mais de là, la traversée comprendra trois étapes dans le sud-est de l'Alaska : Yakutat, Juneau (la capitale de l'Etat), Ketchikan. Je n'aurai pas le temps de poser pied à terre, mais la traversée de l'Archipel Alexandre (Passage Intérieur, en anglais Inside Passage) à base de fjords et de détroits s'annonce grandiose. C'est ce que tout le monde me dit. Prince Rupert est situé sur la côte (vous vous en serez douté !), côté canadien à la frontière avec l'Alaska. Encore un élément pour démontrer l'étendue de l'Alaska et les distances.

Je quitte Casey et Brad, que je n'oublie pas de remercier pour leur accueil chaleureux ! Et pour patienter à Anchorage jusqu'à mercredi, ce sera Vitor (brésilien d'origine) qui m'hébergera.


7 février 2012

Le train du bout du monde

Il est un peu tôt ce dimanche, il fait encore nuit noire. Gentiment, Anna me conduit à la gare, sacrifiant ainsi sa grasse mat'. Moi j'ai un petit pincement au cœur : ces deux semaines à Fairbanks ont vraiment été sensationnelles. Andrew et Anna ont mis le niveau très haut pour les suivants ! Adieux rapides.


Billet en poche. Je remarque que je suis en classe Adventure. On reste dans le ton, c'est bien ! Avant le départ, quelques clichés du majestueux train bleu et jaune qui trône sur sa voie. Impressionnantes locomotives, au nombre de 2. Tout ça pour tirer 3 wagons : wagon bar/restaurant, wagon passagers, wagon de fret. La ligne fêtera ses 100 ans en 2014. Fairbanks-Anchorage (420 miles, soit près de 700 km) en est le tronçon principal et comprend quelques extensions en bouts de ligne.

Le train s'élance. On est vite au milieu de nulle part. Le chef de bord nous fait son annonce. Puis on entend à la radio « It seems we are detached ». Personne ne comprend pourquoi cette radio est branchée sur le haut-parleur du wagon passagers, mais une autre personne enchaîne : « Detached ?! Oh-oh ! This is not good. » Effectivement, on se sent ralentir et le wagon restaurant de s'éloigner petit-à-petit. Vous avez bien compris : notre wagon s'est détaché. Heureusement, on n'est pas trop loin de Fairbanks, et pas non plus encore dans les gorges profondes de l'Alaska Range. On répare vite et on repart vite.


Après cette anecdote, les 12 heures de trajet ne seront qu'une succession de paysages époustouflants que le soleil éclairera différemment selon qu'il se lèvera, qu'il se couchera ou qu'il sera caché ou pas par des nuages passagers. D'abord un paysage plutôt vallonné avec de petits sapins, comme j'en avais vu lors du cabin trip du week-end précédent. Les sapins sont nains tout simplement parce que le sol gelé du permafrost les empêchent de se développer. Ensuite, nous entrerons dans un paysage plus montagneux, à mi-pente de gorges profondes creusées par la rivière. Elle est gelée, mais le tumulte de sa glace et les blocs qui ont semblé pétrifiés en quelques secondes à l'automne laissent imaginer la puissance des eaux. Enfin, on débouche dans une plaine, toujours entourée de montagnes. La quatrième partie est hors commentaire, nuit noire oblige.

Andrew était parti un peu plus tôt que moi en voiture pour faire de l'escalade sur glace (ice-climbing). Un changement de programme l'aura finalement conduit tout près de la voie ferrée. Même si ce n'est pas son groupe, on aperçoit une photo d'alpinistes dans la sélection de photos que j'ai faite.

Le petit train du bout du monde n'est pas bien plein. On est une vingtaine au départ de Fairbanks. On s'arrête au milieu de nulle part pour faire descendre une petite famille. On prend deux femmes un peu plus loin encore, toujours dans un endroit improbable, mais toujours proche d'un passage à niveau qui permet à une voiture de déposer les personnes ou de les récupérer. Deux heures avant l'arrivée on prend une bonne dizaine de personnes dans une grosse bourgade.

Même à une vitesse moyenne de 50 km/h, on n'aura pas vu d'ours ou de loups, mais un bon paquet de caribous et d'élans, bien plus que de maisons. L'Alaska est un vrai désert, un désert immense. Par-ci par-là on aura aperçu quelques industries, certainement liées à l'extraction de minerais. On a même vu ce qui ressemblait à une entrée de mine, avec ses étais en bois et sa petite voie ferrée qui s'enfonce dans la roche. Puis le train s'immobilise au milieu d'un pont suspendu au dessus du vide. Certains redoutent encore le décrochage. Et le conducteur de nous recommander : « Si vous voulez prendre des photos, c'est maintenant ! »


Arrivée à Anchorage sans retard. Casey et Bradley sont là pour m'accueillir. Une nouvelle ville, plus grande, plus chaude (entre -5° et -10°, c'est presque l'été !), plus de neige. L'aventure continue.

Voilà. Et pour revivre le voyage en images, cliquez sur Play !