20 février 2012

« I am an Earth warrior »

Sur son vélo, on peut lire « Burn fat, not oil » (« Brûle de la graisse, pas du pétrole »). Il est 7h30 du matin, il fait encore nuit noire et il pédale. Ce matin, il va d'abord travailler puis cet après-midi, il ira en cours. Mais qui est 'il' ? Ici, tout le monde l'appelle Victor, mais son vrai nom est Vitor.

Vitor est brésilien. Il travaille et étudie à l'Université d'Alaska – Anchorage (UAA). Arrivé en septembre 2011, il suit un master de protection de l'environnement et développement durable. Mais qu'est-ce qui l'a poussé à venir de Curitiba (au Brésil) à Anchorage ? Il est où l'intérêt de perdre jusqu'à 40°C pendant une bonne partie de l'année ? Pourquoi ? Pour quoi ?


Au Brésil, Vitor travaillait dans la finance. Fatigué par la mentalité de ses congénères, il débute en janvier 2011 un voyage de 6 mois à travers les Etats-Unis. Son but est de rencontrer les 50 personnes qui sont listées comme ayant le plus d'influence pour changer le monde. Il part à la recherche d'inspiration mais aussi de solutions concrètes pour construire un monde meilleur. De Los Angeles à Seattle, en passant par Nashville, New York ou encore Chicago, il va en rencontrer une vingtaine : professeurs, associatifs, politiques, photographes, etc.

Puis l'envie d'accroître ses connaissances le pousse à envoyer sa candidature à l'Université d'Alaska – Anchorage (UAA) où il est reçu en septembre 2011. Il étudie donc l'après-midi et le soir. Le matin, il travaille pour arrondir les fins de mois. Il est employé au Bureau du Développement durable (Office of Sustainability) de l'Université. Il fait partie de l'équipe recyclage. Elle collecte tous les matériaux recyclables dans les différents bâtiments de cet immense campus. Ingrat ? Il ne trouve pas. Le matin où je l'ai accompagné dans sa tournée, il m'explique que c'est d'abord sa façon de s'engager. C'est aussi pour lui le moyen idéal d'être au contact des étudiants et des profs et d'accroître chez eux la prise de conscience de la nécessité de bien trier et de recycler. Et il ne fait pas que ça. Le Bureau est plus largement chargé de proposer des solutions pour que l'UAA s'améliore dans tous les domaines possibles du développement durable et de mettre en pratique celles déjà adoptées.

À la fac, Vitor est aussi très impliqué dans la vie étudiante. En tant que "sénateur", il siège au conseil d'administration de l'université. Il s'est fait élire alors que ça ne fait pas encore six mois qu'il est là. Au CA, il milite pour que la fac se donne les moyens d'être classée au niveau mondial parmi les 20 universités les plus en pointe sur le développement durable. Il y a encore beaucoup à faire, et pas uniquement en termes de recyclage ou d'économies d'énergie. Mais l'important c'est de lancer le mouvement. Il est persuadé que c'est par l'exemple que l'UAA fera également bouger d'autres universités aux Etats-Unis. Et les étudiants sont ceux qui seront aux responsabilités demain. Alors autant commencer dès aujourd'hui à prendre soin de notre planète.

Comme il m'a hébergé quasiment une semaine, nous avons pu pas mal discuter, en particulier du niveau de prise de conscience des Alaskains sur le changement climatique ou le développement durable. Il a confirmé ce que j'avais déjà perçu et entendu ailleurs : ce niveau est faible. C'est assez triste quand on sait que l'Alaska est une des régions du monde qui paie et paiera le plus cher les conséquences du changement climatique. Au lieu de ça, l'Alaska continue à forer pour pomper davantage de pétrole et de gaz, ne développe aucune source d'énergie alternative et renouvelable, continue l'expansion de ses villes dans lesquelles les voitures individuelles sont le seul moyen de transport.

Qu'est-ce qui le fait rester optimiste malgré tout ? Il croit dur comme fer que nous avons tous, à notre niveau, une certaine responsabilité. Nous avons la possibilité de nous investir dans des associations, dans des comités locaux (conseil de quartier, etc.), nous impliquer en politique, repenser nos habitudes de consommation et notre interaction avec la nature, etc. Donc nous pouvons tous contribuer à faire de la Terre un monde meilleur. Et Vitor a bien l'intention de rester en Alaska jusqu'à ce qu'il ait tout essayé pour ça.

Il habite une maison en colocation. Les discussions sont souvent assez animées ! Il ne cherche pas à convaincre ses colocataires ou leur faire gober tout rond une vérité ou une autre. Il essaie juste de les amener à réfléchir à leur impact au quotidien sur l'environnement et à leur responsabilité. Et il a toujours autant d'énergie pour s'amuser ou sortir avec ses copains. C'est quelqu'un d'assez drôle. Ce n'est pas un environnementaliste ennuyeux. Comme l'a qualifié une personne qu'il a rencontrée sur la route l'an dernier, Vitor est un combattant de la planète, « an Earth warrior ». Et je pense que ce n'est pas le seul que je serai amené à rencontrer. C'est juste le premier.

1 commentaire:

  1. Merci Nico pour cette pointe d'optimisme!!
    Evidemment qu'on a tous de la graisse à brûler, certains plus que d'autres... Va peut etre falloir que tu creuses ton propre puit finalement!!
    Quentin

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