28 mai 2012

¡Bienvenido a México!

Me voici arrivé au Mexique ! J'ai passé la frontière à Agua Prieta ce dimanche soir, avec Victor (qui m'héberge avec sa femme Reyna pour quelques jours). Ainsi, ce sont quatre mois au Canada et aux Etats-Unis que je boucle. Une seule route, plus de 13.000 km, des paysages très différents. Et surtout des centaines de visages. Des rencontres passionnantes et enrichissantes.


Maintenant, c'est une autre histoire qui va s'écrire, une autre partie du voyage : le Mexique et l'Amérique centrale. Je visiterai tour à tour tous ces pays en enfilade jusqu'à la Colombie, que j'atteindrais vers la mi-septembre.


Hier soir, au-delà d'une ligne sur la carte, c'est surtout une frontière culturelle que j'ai traversée. Un autre monde à appréhender, d'autres réalités, un contexte politique et sécuritaire très différent du Canada ou des Etats-Unis. Et le plus urgent : changer la langue par défaut dans mon cerveau. Place à l'espagnol !

27 mai 2012

Les cowboys et les Indiens

On a tous en tête des images du Far West américain. Des clichés. Pas si clichés que ça, ces représentations vues à travers un appareil photo.

Le Grand Ouest est connu pour ses cowboys et ses pionniers, un peu moins pour la riche histoire des premiers peuples d'Amérique. Vous verrez dans l'album certaines habitations datant pour certaines de près d'un millénaire, nichées dans des grottes, naturellement à l'abri du danger et proches d'un point d'eau. Et vous verrez aussi l'Amérique de la conquête de l'Ouest, de la ruée vers l'or, des mines et des westerns.


24 mai 2012

De l'eau en plein milieu du désert

Aller à la cuisine, ouvrir le robinet et se servir un verre d'eau. On oublie souvent la chance qu'on a d'avoir l'eau courante. L'accès à l'eau est un bien précieux, qui ferait de nous des multimillionnaires si on avait une autre échelle de valeur que la seule valeur marchande. En effet, plus de 900 millions de personnes sur Terre n'ont pas accès à l'eau potable et plus de 2 milliards et demi n'ont pas accès à un système d'assainissement amélioré (entrainant maladies et mortalité élevée).

Dans des régions désertiques comme peut l'être l'Arizona, on sait la valeur de l'eau. Mais ça n'a pas toujours été le cas. Les rivières ont été asséchées au cours du dernier siècle et les nappes phréatiques ont dramatiquement diminué. La raison principale ? Une consommation d'eau pour l'agriculture et l'élevage excessive par rapport à ce que la nature peut offrir en termes de précipitations et de réserves souterraines. Dans un passé plus lointain, les premiers peuples d'Amérique se déplaçaient au gré des sécheresses et bâtissaient leurs axes de communication le long des cours d'eau.

Dès le début des années 1920, les sept Etats du bassin du Colorado (Wyoming, Utah, Colorado, Nouveau Mexique, Arizona, Nevada, Californie) se sont mis d'accord sur les quantités que chacun pourrait y prélever. S'en est suivi la construction de deux barrages dans le bassin du Colorado : le Powell Dam pour la partie supérieure et le Hoover Dam pour la partie inférieure. Mais l'Arizona s'est vite rendu compte que l'accès au Lac Mead (au niveau du Hoover Dam, au Nord de l'Etat) ne suffirait pas. Il a alors été décidé de construire un canal qui approvisionnerait en eau le Sud de l'Etat (en particulier les régions de Phoenix et Tucson). Le canal à ciel ouvert parcourt le désert sur 540 km. Quelque 15 stations de pompage permettent à l'eau d'arriver jusqu'au bout, à Tucson, située à plus de mille mètres au-dessus du niveau du Colorado.

Ainsi l'Arizona consomme son quota d'eau du Colorado tout en le distribuant plus également sur l'ensemble de son territoire. Ce canal nommé Central Arizona Project (que Mitch m'a fait visiter) permet ainsi de limiter le pompage des nappes phréatiques. Environ 1/3 des eaux du canal est utilisé par les villes et 1/3 par l'agriculture. Le 1/3 restant est utilisé en partie par les réserves indiennes ; le surplus étant soit stocké soit reversé dans les nappes phréatiques pour les restaurer.


Bien sûr la capacité d'accueil et d’expansion des villes est mise en question. Mais personne dans la région n'ose avancer de chiffres. Quand faudra-t-il dire « stop ! on ne peut plus accueillir plus de monde parce qu'on n'aura pas assez d'eau pour tous » ? La question (et la réponse !) est éminemment politique. Du coup l'accent est davantage mis sur l'éducation, la récupération des eaux de pluie (parce qu'il y a quand même une saison de mousson en juin-juillet), la limitation du gaspillage, le recyclage. Par exemple, toutes les eaux usées de Phoenix servent à alimenter les circuits de refroidissement de la centrale nucléaire de Palo Verde, située en plein désert à 80 km à l'Ouest. Tucson de son côté a plus de marge de progression puisque pour l'instant seuls 35% des eaux sont recyclées.


Et pour l'avenir ? La question principale reste à savoir si les villes vont continuer à s'agrandir. Ensuite il faudra peut-être repenser l'agriculture de la région, sans doute arrêter la culture du foin et du coton (l'Arizona cultive suffisamment de coton pour fabriquer plus d'un jean par an pour chaque habitant des Etats-Unis). Il sera alors temps de la réorienter vers des cultures moins consommatrices en eau : le « dry farming » (l'aridoculture) qui permet la culture non irriguée en sol aride a prouvé son efficacité, en Afrique par exemple mais également en Espagne.

Pour aller plus loin sur la question de l'eau, vous pouvez également lire Combien d'eau y a-t-il sur Terre?, article intéressant de Pierre Barthélémy sur son blog, Passeurs de sciences.

22 mai 2012

C'est désert, c'est chaud, c'est l'Arizona !

En janvier, à mon arrivée en Alaska, j'y postais mon premier article intitulé « C'est froid, c'est blanc, c'est Fairbanks ! ». Quatre mois plus tard, c'est une toute autre histoire...

Dans l'Arizona, la température dépasse les 100°F (soit plus de 37°C). Le problème, ce n'est pas tant la chaleur, mais plutôt de trouver de l'ombre pour pouvoir bénéficier de cette température. Sinon, ça fait mal ! En plein soleil, on tutoie allègrement les 50°C.

Et l'Arizona, dont le nom viendrait de l'espagnol zona arida, est assez désertique. Le taux d'humidité à Tucson est de 4% ! Je n'ai jamais vu ça. Pas besoin de grill-pain, il suffit de laisser ses toats au soleil 4 minutes 30 (je pense qu'on peut faire la même expérience avec un œuf). On a la bouche sèche à chaque instant ; on boit des litres (d'eau) toute la journée. Les feux sont quotidiens et massifs. Les premiers jours, tout ça fait presque peur. C'est un peu oppressant d'évoluer dans cet environnement si hostile. Et puis, on s'y fait.

Par voie de conséquence, la végétation est toute sèche. Il n'y a pas d'herbe, pas d'arbre, mais des cactus, des buissons, des arbustes, de la rocaille. Les rivières sont indiquées et on les franchit sur des ponts, mais il n'y a pas d'eau. Juste la trace des flash-floods (crue-éclair) qui quelques jours charrient des milliers de litres d'eau tombés du ciel en un temps record. Sinon, c'est le paradis des petits lapins et, moins bucolique, des chauves-souris, des lézards et des serpents. Curieusement, il y a tout de suite beaucoup moins d'écureuils ! Ils ont dû vite comprendre qu'à la différence des platanes, on allait plus difficilement de cactus en cactus.

Pour pouvoir randonner tranquillement, il faut se lever tôt. Je l'ai fait pour le Grand Canyon. J'ai récidivé à Prescott avec Paul et Nina, qui m'ont fait découvrir leur région avant de gentiment me conduire jusqu'à Tucson. Et j'ai persévéré à Tucson avec François-Xavier, Cécile et Ben. Levé à 4h du matin. Départ à 5h passées. La récompense est au bout du sentier.

C'est chaud, c'est désert, c'est sec, c'est étouffant, mais c'est très beau. Et comme en Alaska, on est content de survivre dans ces conditions extrêmes. Et aujourd'hui, j'ai justement abordé le problème de l'eau avec les personnes en charge du canal d'approvisionnement de Tucson. Compte rendu bientôt. Et en plus de l'éclipse partielle de soleil (dernière photo), l'Arizona a encore d'autres merveilles à me faire découvrir.


16 mai 2012

PC Course

Jour 115 – Kilomètre 11.240

Jamais trois semaines n'auront été aussi bien organisées ! Surtout aussi "longtemps" à l'avance ! Je me surprends. C'est peut-être le climat de l'Arizona qui veut ça. Alors reprenons un peu l'itinéraire et notre géographie.

Distance entre Las Vegas et Agua Prieta : 1.805 km

C'est bon, vous situez l'Arizona ? C'est votre part du travail. Je vous aide ; on trouve la Californie à l'Ouest et le Mexique au Sud. J'y suis entré par le coin Nord-Ouest, non loin de Las Vegas, direction Flagstaff. Là, je suis resté le week-end du 5-6 mai chez Henry, très sympa, et l'ambiance de la ville très tranquille.

Puis ce fut le Grand Canyon. Je suis venu, j'ai vu, ça m'a beaucoup plu (cf. article précédent). Après cinq jours, je suis retourné à Flagstaff, chez Henry toujours, pour passer le week-end du 12-13 mai, avant de poursuivre la route vers le Sud.

Deux jours de camping à Cottonwood et Jerome, avant de retrouver Paul (jeune retraité des pompiers) et sa femme Nina (graphiste) qui me font passer deux jours de découverte de Prescott. Au menu, tour en jeep sur des chemins détournés, rando, un peu de découverte de la culture indienne, bonnes discussions et bonne cuisine ! C'est Anne-Marie, une amie de Mike et Eve (chez qui j'avais campé sur la côte californienne) qui, depuis l'Etat de New-York, m'a mis en contact avec eux. Elle l'avait déjà fait pour Marco et Sally puis Michele à Las Vegas. Merci Anne-Marie pour ces belles rencontres !

Voilà pour le Nord de l'Arizona. Paul et Nina m'ont proposé de m'emmener directement dans le Sud, à Tucson où je serai pour la fin de semaine. Je serai alors accueilli par François-Xavier, français, un copain scout de mon cousin Cyrille. Là encore, de belles choses au programme, dans cette région qui s'annonce assez désertique. Rando dans un canyon, une autre dans le désert, des rencontres avec des amis à lui, et un rendez-vous avec les personnes qui gère le canal approvisionnant en eau la ville de Tucson. Je vais adorer !

Portal, à l'Est de l'Etat, sera l'étape suivante. Là c'est Ron, la soixantaine, qui me fera découvrir sa région. Ron est un peu un cadeau tombé du ciel. C'est lui qui m'a contacté via CouchSurfing, alors que c'est moi généralement qui contacte des personnes par ce système pour loger chez l'habitant. Il semble tout aussi excité que moi. Ça s'annonce très roots ! Il m'a prévenu : « have your camera and walking shoes ready! » (« prépare ton appareil photo et tes chaussures de marche ! »). Et pour couronner le tout, il vient même me chercher à Tucson et me déposera à mon étape suivante. Près de 450 km en tout, mais c'est son excuse pour être sûr que je ne loupe rien de la région.

Enfin, la dernière étape au Etats-Unis sera à Hereford chez James, mon âge, pompier en zone naturelle sauvage (wildland firefighter très exactement, désolé j'ai pas de meilleure traduction à proposer). Là encore ça s'annonce pas mal. J'y serai les 25-26 mai ; ça tombe exactement pendant ses deux jours de congé hebdomadaire. Et lui aussi me propose des activités en pleine nature, et d'aller voir la fameuse barrière frontalière entre les Etats-Unis et le Mexique.

Ensuite, let's go to Mexico ! Comme par miracle, Victor, le père d'une amie de Cécile, ma belle-soeur, passera non loin d'Hereford le 27 mai. Il habite juste de l'autre côté de la frontière, à Agua Prieta. Il me prendra donc au passage et il m'accueillera quelques jours avec sa femme Reyna pour mes premiers pas au Mexique.

C'est ainsi que s'achève en beauté la première partie de mon voyage, celle qui m'aura permis de découvrir une partie du Canada et des Etats-Unis (Alaska compris). Pour clore ce premier chapitre, je vous proposerai un petit bilan, mais j'aimerais le faire sur la base de vos questions et remarques. J'ai déjà compilé celles des 4e. Pour ceux qui veulent m'envoyer leurs questions, vous pouvez les poster dans les commentaires de ce message ou m'envoyer un mail (coordonnées dans la partie « Qui suis-je ? » de ce blog).

14 mai 2012

Le Grand Canyon

Finalement, pas besoin de louer une voiture pour se rendre au Grand Canyon. Une navette m'y conduit depuis ma base arrière chez Henry à Flagstaff, à 150 km de là. J'en profite pour nous situer. Le Grand Canyon est dans le Nord de l'Arizona, Etat voisin de la Californie et du Nevada. Et qui dit canyon, dit rivière au fond du canyon. Au jeu des 1.000 francs, qui aurait gagné en répondant que c'est le Colorado qui coule dans le Grand Canyon ?

Depuis Flagstaff, la route monte pour atteindre le plateau du Colorado, région immense et plate, plus grande que le Royaume-Uni et l'Irlande réunis, qui s'étend sur les Etats du Colorado, de l'Utah, de l'Arizona et du Nouveau-Mexique.

Cliquer sur la carte pour l'aggrandir

Me voici donc arrivé aux portes du Parc national du Grand Canyon. Mais on ne voit toujours rien. Je file planter ma tente parce qu'il y a du monde, malgré l'heure matinale, et je n'ai pas envie de m'entendre dire que le seul camping à trente kilomètres à la ronde est complet. L'excitation monte ; je me dirige maintenant vers le "rim" ("rive" serait la meilleure traduction, en gros c'est le bord du canyon). Je ne verrai rien avant de l'avoir atteint.

Et là, d'un coup, tout apparaît, tout se déroule sous mes yeux. Comme tout le monde, je reste bouche bée devant la puissance que dégage le lieu. Une raison unique : ses dimensions. Le Canyon mérite bien son adjectif de Grand. La rive d'en face est à 15-20 kilomètres à vol d'oiseau. Dans certaines directions, on voit à plus de cent kilomètres à la ronde, sans toutefois avoir un aperçu global des 450 kilomètres du Canyon. Et le fond du Canyon est à 1500 mètres en contre-bas. On pourrait y empiler près de cinq Tour Eiffel... verticalement bien sûr ! C'est tellement encaissé qu'on ne voit quasiment jamais la rivière.


Mais évidemment, comme tout le monde, j'étais aussi arrivé avec ma représentation et des images du Grand Canyon. Et au final, ça ne collait pas tout à fait à la réalité. Là, c'est pour trois raisons : la visibilité, les couleurs et l'aspect chaotique.
1. Visibilité, parce qu'il y a en permanence une espèce de voile, lié à la pollution qui vient du Sud de la Californie (à l'Ouest) ou parfois du Nouveau-Mexique (à l'Est).
2. Couleurs, parce qu'en arrivant sur le bord pour la première fois en pleine journée, il n'y a quasiment pas d'ombre et le soleil frappe de plein fouet les pierres, leur donnant une couleur grisonnante uniforme – alors qu'à d'autres heures de la journée, on pourra admirer toute la palette du rouge au vert en passant par l'ocre et le gris.
3. Aspect chaotique, enfin, parce que le Canyon ne s'est pas érodé de manière uniforme sur toute sa largeur, sachant qu'en plus, les rivières affluant dans le Colorado ont elles aussi contribué à "grignoter" les rebords et creuser des canyons secondaires.

J'ai donc fait les réglages nécessaires sur mon appareil photo (contraste, lumière et saturation) pour un meilleur rendu des prises de vue.


Quand on voit ça, on comprend facilement que le Canyon fasse l'objet de toutes les attentions. Les Etats-Unis en ont fait un Monument National dès 1908, puis un Parc National en 1919. Et 60 ans plus tard, en 1979, le Grand Canyon fait partie des premiers sites inscrits sur la liste du Patrimoine mondial de l'Unesco. Plus de 400 Park Rangers veillent à sa préservation et à l'accueil des quelque 4,5 millions de personnes qui, comme moi, l'auront visité en 2012.

Je passe ma première journée sur le bord du Canyon, me rendant à plusieurs points de vue différents. Cet endroit est vraiment fascinant. Mais je sens bien que je pourrais avoir une expérience encore plus intéressante si je m'enfonçais dans ses entrailles. Je me renseigne donc sur les possibilités de randonnée au cœur même du Canyon. Je passe au bureau des randonnées "backcountry" (en pleine nature). Vingt minutes après, je ressors avec mon permis spécial et mes réservations dans les bivouacs en contre-bas. Et voilà, dès le lendemain c'est parti pour trois jours de rando.

Quand on reste sur le bord, on change son point de vue horizontalement, certes. Mais effectivement, descendre offre une perspective totalement différente. La première image qui me vient en tête, c'est celle d'une passoire de plage géante. Ne me dites pas que je suis le seul à être fasciné par le lent écoulement du sable dans une passoire de plage et les motifs qui apparaissent petit à petit.

La descente est d'abord abrupte. Dieu merci, je ne suis pas sensible au vide. Puis les pentes sont moins raides, puis à nouveau plus escarpées. Et ainsi de suite en fonction des couches de roche que nous traversons. Mettons pause quelques instants, le temps de vous raconter rapidement l'histoire du Canyon.

En gros, il y a deux milliards d'années, a commencé un phénomène de déposition de sédiments, en différentes couches de composition différente, sur ce qui était alors submergé par l'océan. Puis, il y a 65 millions d'années (au moment de la disparition des dinosaures), ce qui est aujourd'hui le plateau du Colorado s'est élevé des eaux, à plus de 2000 mètres. Je vous épargne la théorie de la tectonique des plaques, le phénomène de convection et la dérive des continents. Et je fais un bond jusqu’il y a 5 millions d'années. Là, le Colorado commence à parcourir le plateau du même nom et à creuser le Grand Canyon dans la partie sud. Les roches étant de composition différente, alternant couches friables et couches plus dures, l'érosion (liée au fleuve, mais aussi à la pluie et au gel qui fait se fissurer la roche) rend certaines portions plus abruptes que d'autres. Et ainsi laisse apparaître des couches de différentes couleurs. De haut en bas, on trouvera du calcaire, du grès rouge (forte présence de fer oxydé ; de la rouille, quoi!), calcaire à nouveau mais plus gris-vert, et enfin, schiste au fond. On a ainsi une frise du temps puisque les roches au fond du Canyon datent de 1,7 milliard d'années, tandis que celles du haut, de 230 millions d'années.


Retournons dans notre étuve. Oui, parce qu'il fait chaud à l'intérieur du Canyon. La température est de 20°-25°C en haut avec un petit vent frais, mais elle monte à plus de 35°C quand on descend. Et tout ça bien sûr quand on a la chance de trouver de l'ombre ! Vu l'environnement, il y a donc peu de monde qui s'aventure en randonnée dans le Canyon. J'ai presque envie de dire « tant mieux » ! Mais on trouve une faune très diverse et peu farouche. Cela va des lézards aux écureuils, en passant par de petits cerfs et des condors californiens réintroduits récemment.

La vue est vertigineuse en haut de la dernière partie (celle en schiste si vous avez bien suivi). On est à pic, à 500 mètres au-dessus du Colorado. Dommage pour ceux qui ont le vertige et qui ne peuvent pas profiter de ce point de vue magnifique. Mais moi, je me suis régalé ! (vidéos disponibles dans l'article précédent)

Arrivé en bas, on traverse un tunnel qui aboutit sur un pont enjambant le fleuve. Le chemin mène rapidement au Colorado qui semble bien paisible et appelle à le rejoindre. Mais non ! Impossible de se baigner. Les courants sont mortels, et l'eau glaciale de toute façon. Je me rabats donc sur un affluent, où se situe mon camp du jour. Je me baigne et me lave sommairement au milieu des cerfs qui broutent en plein bivouac. Les écureuils en attendant s'en seront pris férocement à mon petit sac, tentant d'atteindre le mélange de cacahuètes et de noix qu'ils avaient dû sentir. Désormais je n'oublierai plus de mettre toute ma nourriture dans les containers en fer prévus à cet effet, comme pour les ours dans le Yosemite.


En me promenant en fin de journée le long du Colorado, j'aperçois un gros carton, au bord du chemin. Je ris seul en lisant le message qu'a sans doute laissé le coursier de FedEx proche du burn-out : « Enjoy this! As of June 1st we will NOT deliver mail anymore! » (« Profitez-en ! À partir du 1er juin, nous ne livrerons plus les paquets ! »). Visiblement, il n'a pas pensé à utiliser les mules que certains empruntent pour descendre dans le Canyon.

Ce que j'aime dans le camping, c'est qu'on se cale beaucoup plus naturellement sur le rythme du soleil. Lever tôt, coucher tôt. Ça fait beaucoup de bien et permet de marcher le matin "à la fraîche". Deuxième jour, j'entame la remontée. Pas trop compliqué ; je m'arrête à mi-pente pour le deuxième bivouac. Là j'y rencontre Alex, un Français qui fait un road-trip à travers les Etats-Unis. Chic type, chouette rencontre. On va admirer le coucher de soleil au-dessus des falaises vertigineuses. Selon moi, c'est le plus bel endroit du Canyon : le fleuve tumultueux à 500 mètres sous nos pieds, et les rives du Canyon qui nous entourent du haut de leur 1000 mètres. On est littéralement au milieu du canyon. En fin de journée, les roches prennent des couleurs différentes. Il faut aimer le rouge ! On a toute la palette qui va du rouge ocre au rouge bordeaux en passant par le rouge orangé.

Le lendemain, je remonte "à la surface" avec Alex avant qu'on ne se quitte, lui pour reprendre sa route vers Las Vegas puis la côte californienne, moi pour rester 24 heures de plus. Je rencontre Robb, un Park Ranger, passionnant et intarissable sur l'histoire et la géologie du Canyon. Le soir, j'assiste à un magnifique coucher de soleil (tu aurais adoré, Papa!) pour boucler en beauté ces quelques jours magiques.


7 mai 2012

Les lumières de Las Vegas

On sent une légère frénésie à l'approche de cette ville mirage. On sait qu'elle est là, au loin. On a fait plusieurs heures de route en plein désert et traversé deux petites villes seulement. Et plus on s'approche, plus le trafic s'intensifie en ce vendredi soir où les voitures parties de Los Angeles commencent à rattraper notre bus.

J'ai longtemps hésité avant de faire étape à Las Vegas. J'avais peur d'être vite écœuré par cette grande ville, surnommée Sin City (« la ville du péché »), où seuls règnent l'argent et le divertissement en tout genre... À tel point qu'on a pris l'habitude de se déculpabiliser de tous ses excès en se disant : « What happens in Vegas, stays in Vegas! » (« Ce qui se passe à Vegas, reste à Vegas ! »). Et puis je me suis laissé convaincre par certains d'aller juger par moi-même. Après tout, c'est sur le chemin du Grand Canyon, donc c'est pas comme si je faisais un gros détour.

En pensant à la façon dont je pourrais décrire Vegas, la première image qui m'est venue est celle du jeu de société Hôtel. Je ne sais pas si beaucoup connaissent, mais c'est exactement ça, grandeur nature. Las Vegas est un immense terrain de jeu, jonché d'hôtels à l'architecture thématique, où les visiteurs sont de grands enfants qui ne pensent qu'à jouer et à s'amuser, le tout dans une ambiance joyeuse et insouciante.


L'envie de jouer ne m'a pas submergé. Je n'ai donc pas eu à lutter pour éviter de diminuer inutilement mon budget limité. Les sirènes de la roulette, le poker, le craps, le black-jack, les machines à sous n'auront produit aucun effet sur moi. En revanche, je me suis laissé embarquer par Sally (mon hôte, par ailleurs croupière au prestigieux Bellagio) dans les vertigineuses montagnes russes du New-York et au Big Shot en haut de la tour Stratosphère (celle qui ressemble à un cône de glace avec une antenne). En gros, la nacelle est propulsée sur 50 mètres le long de l'antenne et redescend en chute libre, le tout à 330 m d'altitude (un peu plus que la Tour Eiffel). Sensations fortes garanties !

J'ai arpenté le Strip de jour et de nuit. Le Strip, c'est une portion du Las Vegas Boulevard de près de 7 km et qui regroupe tous les plus grands hôtels-casinos de la ville : le Bellagio, le Paris, le Caesars Palace, le Mirage, le Venetian, le Monte-Carlo, le New-York, l'Excalibur, le MGM Grand, le Luxor et le Mandalay Bay pour ne citer que les plus célèbres. La ville possède des centaines de casinos. Il y a même des sections machines-à-sous dans les supermarchés, entre le marchand de journaux et la parapharmacie.


Tout ça ne fait pas oublier qu'on est quand même en plein milieu du désert à 600 mètres d'altitude. Il fait très chaud et très sec. On se déshydrate en un rien de temps. Justement, l'eau est un problème particulièrement tangible. La principale ressource est l'immense Lac Mead, à l'Est de la ville, où un barrage (le Hoover Dam) sur le Colorado permet de contenir les eaux du tumultueux fleuve et d'alimenter en eau le Sud du Nevada, la Californie du Sud et l'Arizona voisin. Mais l'effet combiné de la hausse de la consommation et du réchauffement climatique fait craindre un assèchement complet d'ici 10 ans du plus grand réservoir des Etats-Unis, aujourd'hui grand comme six fois Paris.

J'ai donc pris du plaisir à découvrir cet univers très particulier et sans équivalent dans le monde. J'ai aussi appris les conséquences dramatiques qu'a eu la crise des subprimes de 2008 (Las Vegas est comme l'une des villes les plus touchées par la crise). J'ai vu l'envers du décor, des quartiers délaissés et des sans domicile fixe. Je n'aurais pas été dégouté par l'argent (on ne le voit pas – tout est sous forme de jetons ou de reçus de grain). Et au final j'aurais particulièrement bien profité de Marco et Sally, puis de Michele, mes hôtes de choc.


5 mai 2012

Le Yosemite avant le désert

Deux albums photos. Deux ambiances très différentes. Deux climats aux antipodes.

Le Yosemite, classé Parc National en 1890, est le deuxième plus ancien après le Parc National du Yellowstone. Il doit beaucoup à John Muir, naturaliste du XIXe siècle.

Même si le Parc s'étend sur plus de 3.000 km², les visiteurs n'ont accès qu'à 1% du Parc. Le reste est classé « aire sauvage ». Mais on est déjà bien servis quand on a pu admirer la vallée du Yosemite, dans la partie centrale du Parc, articulée autour de ses deux points-phare : El Capitan et le Half-Dome.

Cette vallée plutôt étroite est bordée d'immenses falaises de granite (la marque de fabrique du Parc et le bonheur des passionnés d'escalade). Autour de la rivière qui coule au milieu, les sapins et la végétation offrent aux cerfs, ours et grands félins un habitat privilégié. Enfin, d'innombrables chutes d'eau vertigineuses ponctuent ce paysage vert et gris.

Au milieu de cette grandeur et de cette majesté, on se sent petit, humble. Une certaine sérénité règne dans la vallée. Visuellement, tout semble en harmonie. Les cerfs ne fuient pas à notre approche, les écureuils ont l'air particulièrement épanouis, les ours ne sont pas très loin et ne représentent aucun danger tant que la nourriture est mis à l'abri.

J'ai campé deux nuits, avant de reprendre la route sous la pression de la pluie qui s'intensifiait.


Puis, j'ai pris la route du Nevada, direction Las Vegas. En quittant la Californie centrale, on s'enfonce très rapidement dans le désert de Mojave. Paysages lunaires typiques, parsemés d'une végétation très spécifique, à base de cactus et de buissons secs. C'est un autre monde, au milieu duquel on sent l'hostilité de l'environnement.

Le climat y est extrêmement sec. On se déshydrate à vitesse grand V. Les saignements de nez sont quotidiens. Les villes sont plus rares, plus éloignées, plus perdues dans l'immensité.

Grâce à Marco et Sally qui m'ont accueillis près d'une semaine, on a pu aller dans la Valley of Fire (la Vallée de Feu). Les photos valent explication.


2 mai 2012

Réponses aux questions des 4e

Un petit message spécial aux 4e qui suivent mon périple avec leur prof d'histoire géo. Rien de confidentiel, tout le monde peut regarder !

Pour une fois, je vais tenter la vidéo pour répondre aux commentaires que vous avez postés sur mes précédents articles avant les vacances. Ça permettra de faire un petit bilan de manière un peu plus "vivante". J'espère que ça vous plaira !


1 mai 2012

100e jour

100 jours, c'est :
  • 3 mois et 8 jours
  • 10.270 km (vol Paris-Fairbanks non compris)
  • 253 heures passées dans les transports, soit 10 jours et demi non stop
  • 7 Etats aux Etats-Unis (Alaska, Montana, Idaho, Washington, Oregon, Californie et Nevada) et 2 provinces canadiennes (Colombie britannique et Alberta)
  • 7 moyens de transport (marche, voiture, ski, train, ferry, bus, vélo)
  • 52 conducteurs qui m'ont pris en stop
  • 38 hébergements différents
  • 4.329 photos prises
  • 83°C de différence entre Fairbanks (minimum à -49°C) et Las Vegas (maximum à +34°C)
  • 1 vote par procuration
  • 1 seul McDo
  • plus de 12.000 visites sur le blog et 141 commentaires postés : merci à tous !

100 jours, c'est aussi :
  • mille visages croisés
  • de belles surprises quand je suis invité chez des gens au lieu de camper
  • de vraies émotions devant la gentillesse et la générosité des gens ou devant la beauté de certains endroits
  • des décisions quotidiennes sur la route à prendre
  • des heures de discussions tellement enrichissantes
  • des moments de doute ou de questionnement
  • des joies simples et de bonnes rigolades quand le courant passe bien avec ceux que je rencontre
  • des jours où j'aimerais partager l'expérience avec d'autres
  • une appréhension de l'inconnu dissipée dès mon arrivée en Alaska
  • un apprentissage de la vie au quotidien.