Un
originaire du Monténégro, une mère en vacances avec son fils, deux
baba-cools londoniens, deux Belges tout juste diplômés. Quelle
relation entre toutes ces personnes ? Aucune, si ce n'est
d'avoir croisé leur route, le long de la côte Pacifique des
Etats-Unis.
Je
savais que j'allais prendre beaucoup de plaisir entre Portland et San
Francisco. D'abord parce que la côte est belle, sauvage, légèrement
lugubre si la météo est moins bonne, très peu peuplée, et très
bien préservée. Mais c'est aussi une de ces régions des Etats-Unis
où on croise beaucoup de personnes très … cool !
Il y a
eu David, originaire du Monténégro. Je faisais du stop au coin
d'une rue de Portland et on a commencé à discuter, de tout, de
rien, mais surtout de la pluie qui tombait. Au final, il m'aura
invité prendre un café chez lui, indiqué une meilleure route pour
atteindre mon étape suivante, préparé mon panneau pour faire du
stop, et discuté un bon moment de l'ex-Yougoslavie. À une autre
époque il avait rencontré plusieurs fois et interviewé le criminel
de guerre Radovan Karadzic (qu'il appelle toujours Radovan et qu'il
considère comme son ami). Improbable rencontre !
Janna
et Tyler me sont passés devant en voiture. Cinq minutes après, ils
me repassaient devant mais pour s'arrêter cette fois. En vacances
sur la côte, ils ont trouvé que j'avais une bonne tête et ont
décidé de me prendre en stop finalement. Bonne pioche pour moi
puisqu'ils étaient aussi peu pressés que moi. On a donc pris
quelques détours pour faire les touristes, voir un phare, un cap,
observer des baleines au loin, randonner un peu, avant de me déposer
chez mes hôtes du jour, ceux-là mêmes que vous avez découverts
dans l'article sur Pacific City.
Seth,
un autre hôte sur la côte, m'a fait découvrir ses talents de
cuisinier végétarien et de jolis coins en dehors de la ville, et fait partager des soirées sympas avec ses
potes de Lincoln City. Sans ça, il y a fort à parier que cette
ville triste et sans caractère ne m'aurait pas laissé un souvenir
impérissable.
J'ai
croisé Lesanna sur un pont à Newport. Un de ces grands ponts
métalliques en treillis dont l'Ouest américain est truffé.
J'arrivais sur l'autre rive quand on s'est croisés. Elle, poussant
son vélo ; moi, sac au dos légèrement décoiffé par le vent.
Je lui ai juste conseillé de bien tenir son vélo dans le vent.
Visiblement ça l'a effrayé. Du coup on a commencé à discuter, sur
ce pont, sur ce trottoir réduit à deux mètres des voitures qui
passent à toute vitesse. Grande voyageuse elle aussi, on a parlé de
nos périples respectifs. Après quoi on a décidé de diner ensemble
avec son collègue Andy, biologiste également à l'Aquarium de
Seattle. Et au final, elle n'aura jamais traversé ce pont en vélo
pour aller voir le phare sur l'autre rive.
Il
était tôt ce matin-là. Et il pleuvait comme jamais. Sous mon
poncho pour faire du stop (pas trop le choix!) je savais mes chances
de succès assez minces. Mais Kirk a eu pitié. Un jeune de 20 ans
qui rentrait de son boulot de nuit. Et je pense qu'en se couchant ce
matin-là, il a rêvé de voyages. Il en rêvait déjà quand on
parlait de ses envies et de mon périple.
Micah
lui s'est arrêté parce qu'il s'est dit en me voyant qu'il craignait pas grand-chose. Il est vrai que l'idée-même
de vouloir m'opposer à lui est déjà en soi une très bonne blague.
Imposant donc, mais tellement sympa. Arrivé à Florence, où il
travaillait, il appelle Christine, sa femme, pour qu'elle nous
rejoigne et m'invite à déjeuner. Autour d'un bon vrai hamburger
américain, on a parlé de la France (où Christine a vécu quelques mois étant plus jeune), de leurs six enfants, de l'Oregon, de mon
voyage et de leur ancien élevage de bisons.
D'habitude
je suis vigilant et je "trie" les voitures dans lesquelles
je sens que je peux monter... ou pas. Il est arrivé trois ou quatre
fois que je refuse poliment quand je trouve la/les personne(s) un
peu... étrange(s). Quand Lucio a débarqué avec son camping-car
débordant de fringues entassés, de matelas débordant sur les
sièges avant, de vieux paquets de fast-food, et de couvertures pour
le chien sur le siège passager, je sais pas ce qui m'a pris mais je
suis monté. Et finalement, Lucio est un type formidable. Un vrai
hippie, c'est tout.
Ce
soir-là, j'ai déniché un petit camping gratuit à Winchester Bay.
Il faut dire, une tente et un sac à dos, ça consomme pas beaucoup
d'eau ni d'électricité comparé à mes camping-cars de voisins (qui
sont en réalité des camping-bus avec une remorque à l'arrière).
Je rigolais seul de cette disproportion de nos façons de voyager
quand Ed m'a demandé s'il n'avait pas écrasé ma tente en reculant.
Quel blagueur ! Et là tout s'est enchainé : apéro avec
son copain Mike lui aussi shérif de son état, puis diner mexicain
avec l'ensemble des occupants des trois autres camping-bus (toute une
bande de vrais shérifs avec leur ados). Et le lendemain matin, café
chaud avant de reprendre la route.
Gary,
elle aussi a fait demi-tour, après en avoir discuté avec Chris, son
locataire, avec qui elle rentrait à Bandon après leurs courses. Un
côté très zen, de longs cheveux blancs, de larges lunettes de
soleil, laissaient l'imaginer dans les années 70. Tellement sympa,
qu'elle a même insisté pour m'emmener directement à Port Orford en
me proposant un véritable petit tour dans des endroits que je
n'aurais jamais découverts si j'avais tracé tout droit.
Arrivé
à destination, Kathy m'a accueilli avec tellement d'enthousiasme et
de dynamisme qu'elle m'a rappelé une autre arrière-grand-mère que
je connais. On a marché sur la plage, longé la falaise, visité un
phare, cru apercevoir des baleines au loin. J'ai fait sécher ma
tente dans son salon, elle m'a préparé un délicieux
petit-déjeuner, on a remarché, avant qu'elle ne m'accompagne
elle-même à mon étape suivante. Un grand moment de partage.
Rob et
Dave sont deux Londoniens débarqués dans l'Oregon il y a une
vingtaine d'année avec leurs parents. Ils y sont toujours. Eux aussi
prennent la vie telle qu'elle se présente, et tout va bien. Ils
vivent d'un tas d'occupations à côté de leur petite imprimerie.
Leur maison à Brookings est un assemblage de mille et une choses
loufoques dont je n'aurais jamais imaginé qu'on puisse un jour oser
les associer à l'intérieur d'un même espace : un
mini-rotative pour impression, une guirlande lumineuse de Noël, des
planches de surfs, un canapé immense, tout un tas d'instruments de
musique, un mur recouvert de toile de jute pour déco, un autre de
papier journal, un bananier, et j'en passe.
Au
dehors, Leon était là. J'ai discuté avec lui une bonne heure. Très
intriguant, Leon (pas de photo malheureusement). Ça a commencé avec
sa théorie des événements cataclysmiques (type tsunami ou
tremblement de terre) téléguidés par l'Homme. Une puissance
obscure qui chercherait à augmenter son pouvoir en atomisant
certaines communautés à coup de catastrophe naturelle. Et puis il y
a eu tout un refrain sur le changement climatique. Là j'ai quand
même exprimé mon point de vue. Et le 11-septembre. Et d'autres
après. Mais tout ça dans la bonne humeur.
Au
café le lendemain avec Dave (photo ci-dessus), j'ai rencontré Deanne qui m'a proposé
de m'accompagner jusqu'à la frontière californienne, puis jusqu'à
une autre ville. On a fini par passer chez elle quand elle a vu mon
intérêt pour son projet de Bed & Breakfast avec une
partie jardin potager. Un côté « Accueil paysan » ou
« Bienvenue à la ferme » qui m'a beaucoup plu. Et au
final, elle m'a emmené visiter les impressionnants Redwoods, ces
arbres immenses au tronc cylindrique long et au feuillage perché à
près de 100 mètres au-dessus du sol.
Deux
Belges en voyage post-diplôme de fin d'étude, ça donne quoi ?
Ça donne un road-trip de 4 ou 5 mois en voiture autour des
US, dans le sens inverse des aiguilles d'une montre. Ça donne aussi
quelques sourires quand j'ai su qu'ils avaient eu du mal à trouver
la côte Pacifique, qu'ils avaient perdu le double de leur clé de
voiture, qu'ils avaient cramé la batterie de la même voiture parce
qu'ils avaient écouté la musique en s'endormant dedans. Des
anecdotes de voyage, ils en ont ! Et ce n'est pas une blague. Et on a pris notre temps, on a campé, on a cuisiné au feu de bois, on a fait nos touristes. Et ça, ça n'a pas de prix !
Mike,
lui, m'a proposé de me déposer cinq kilomètres plus loin. J'ai
accepté. Je lui ai dit que je cherchais à aller à un camping
gratuit le long de la côte. Il m'a suggéré un endroit pas loin de
là où il m'a déposé, comme plan B au cas où personne d'autre ne
s'arrêterait. Au final, c'est lui cinq minutes après qui s'est
arrêté à nouveau et m'a proposé son jardin comme camping gratuit. Une vraie garden party ! Et avec sa femme Eve et lui, j'ai passé deux très belles soirées à
cuisiner et discuter.
De belles rencontres. Et pour ceux/celles qui me tannent pour une photo de moi, voilà !
Bon, je vais peut-être m'arrêter là. Il y en a eu tant d'autres. Et il y aurait plus du double à
écrire sur tous les chiens, chats, lamas, et autres animaux domestiques que j'ai croisés mais
ce serait moins intéressant. Vous retrouverez tous ces visages dans la galerie de portraits sur la page "Photos" (et remise ici aussi). Et pour les paysages, attendez encore
quelques jours que je sois arrivé à San Francisco pour tout mettre
d'un coup.
Que de belles rencontres et de beaux portraits Nico, c'est passionnant !!
RépondreSupprimerMerci pour tous ces portraits !!!! très bons résumés! A chaque fois je me dit : il est quand même impressionnant ce nico ;-) !
RépondreSupprimerET MERCI pour la photo de toi !!!!
Dans l'attente de te lire !
Quelle belle mosaïque de rencontres !
RépondreSupprimerBravo pour ton talent de conteur.
A +
Lucio a trop la classe avec ses housses de sièges "Hello Kitty" !!
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