29 septembre 2012

Bogotá

Dans la série Je continue d'être enchanté par la Colombie, voici l'épisode Bogotá. Le scénario n'était pas forcément écrit à l'avance. Les seuls acteurs qui devaient entrer en scène étaient Diana, une amie de ma copine Maïwenn, qui m'avait offert de m'accueillir durant mon séjour et Julien un volontaire français de la Délégation Catholique pour la Coopération (la DCC) avec qui j'étais en contact depuis plusieurs jours.

Je dirais que l'épisode a même débuté dès le départ de Medellín. On plante le décor : alors qu'on est déjà à 1.600 ou 1.700 m. d'altitude, la route s'élève rapidement puis serpente à flanc de coteaux, sur les hauteurs de la Cordillère centrale. Les Andes ont ici un costume tropical, une végétation qui dégueule de verdure. Les paysages de montagnes vertigineux offrent ses premiers frissons au spectateur voyageur. Vient ensuite la descente vers le Río Magdalena, ce grand fleuve qui traverse la Colombie du Sud au Nord. Une fois de l'autre côté, on remonte la pente lentement pour atteindre le plateau de Bogotá à 2.650 m. On peut alors applaudir cette première scène qui a tout de même duré dix heures mais sans incident dramatique, ce qui relève de l'exploit vu l'étroitesse de la route et le trafic impressionnant des semi-remorques et autres camions-citernes.

C'est alors qu'entre en scène Diana. À la gare routière, elle est venue m'accueillir chaleureusement mais cela n'empêcha pas mon deuxième frisson de la journée : il fait 12°C ! Le contraste en quelques jours entre Carthagène, Medellín puis Bogotá est saisissant. Je suis hébergé dans l'appartement familial où je fais la connaissance de ses parents. Le lendemain, je profite de l'anniversaire de son père pour cuisiner un gâteau au chocolat. En Amérique du Nord j'avais déjà eu l'occasion de constater que la cuisson prenait plus de temps en altitude, quand l'oxygène vient à manquer. Mais à ce point !... Au lieu du quart d'heure conventionnel, le suspense a duré plus d'une heure, sachant qu'à mi-temps, j'ai dû aussi me résigner à augmenter la température de 200° à 300°C. Marie-Estelle, cette mise à jour est à noter dans la recette !


A Bogotá, je rencontre Julien. Il est volontaire pour la DCC depuis presque un an et a renouvelé son contrat pour une année supplémentaire. Il travaille dans un quartier populaire du Sud de la capitale pour l'association Projeter sans frontières, une ONG de développement dont les projets participatifs visent à combattre la pauvreté, l’exclusion sociale et les menaces contre l’environnement et la culture des populations locales. Echange d'expériences très intéressant autour d'un cappuccino puis d'une balade dans le quartier historique de la Candelaria. Une de ces mille et une rencontres enrichissantes qui font la beauté du voyage.

La scène suivante se déroule sur deux jours. Changement radical de décor. En voici le script. Le père de Diana possède une finca (une ferme) à Castilla la Nueva, à 180 km de Bogotá, où il passe cinq jours par semaine, sa femme l'accompagnant en général une fois par mois. Quand j'apprends qu'ils s'y rendent le lendemain, je leur demande de les accompagner, quitte à rentrer en bus. Nous partons donc tous les trois pour dévaler ces 180 km, au sens littéral du terme puisqu'on passera de 3.000 mètres sur les hauteurs de Bogotá à quasiment le niveau de la mer dans l'immense plaine de l'est colombien. On passe des fraîches montagnes andines à la chaude plaine amazonienne aussi subitement que de vie à trépas.

Je passe donc deux jours à voir comment fonctionne cette ferme, avec son troupeau de vaches laitières et ses taureaux pour la boucherie, avec ses bassins piscicoles (très bon, le poisson bien frais!), avec ses champs de maïs, avec sa basse-cour, ses chevaux, ses singes. Cette région, aussi appelée los Llanos (grandes plaines herbeuses), s'étend sur plus de la moitié du pays, jusqu'aux confins du Venezuela et du Brésil. La petite moitié ouest de la Colombie est constituée de trois chaines de montagnes parallèles : la cordillère occidentale, la cordillère centrale et la cordillère orientale. C'est l'extrémité nord de la Cordillère des Andes.

Les dernières séquences se passeront à Bogotá avec, en ordre d'apparition, l'ascencion du Monserrate pour admirer la vue sur la ville, la visite de la maison de Simon Bolivar, le Libertador (grand artisan des indépendances de la Bolivie, la Colombie, l'Équateur, le Panama, le Pérou et le Venezuela) puis du très réputé Musée de l'Or. Coup de projecteur sur Bogotá : ancienne capitale du royaume de Nouvelle-Grenade (Colombie, Equateur et Venezuela actuels), un centre ville historique, des quartiers populaires, des quartiers d'affaires, des embouteillages monstres, un système de transport public en-deçà des enjeux d'une capitale. La ville est tentaculaire, plus de 9 millions d'habitants (1/5 de la population du pays). Mais on s'y repère plutôt facilement grâce à son plan hippodamien (j'ai récemment appris ce mot!). Séquence culture générale (à part pour les architectes de la famille) : Hippodamos de Milet, architecte grec du Ve siècle av. J-C, est reconnu pour avoir été un des fondateurs de la planification urbaine : il a créé le plan en damier.

Voici venu le moment du générique de fin, où je citerai pour la cuisine : les grandes qualités culinaires des cuisinières que j'aurais croisées à Bogotá et à Castilla la Nueva ; pour la musique : les soirées bogotanas en compagnie de Diana, Claudio et Paula ; et la palme d'or pour le clou du spectacle le dernier jour, dimanche midi. Alors que j'achetais de nouvelles chaussures au centre commercial, j'aperçois des chaises bien ordonnées en plein milieu d'une des allées commerçantes, au pied des escalators, toutes tournées vers une table qui servira très rapidement d'autel pour la messe qui est sur le point de démarrer. La messe dans un temple de la consommation, c'est concept !

Près de San Agustín (dans le Sud de la Colombie), dans la plantation de café où j'ai posé mon sac à dos pour deux semaines, je suis maintenant bien loin de Bogotá. On est toujours dans la même série, mais suite du récit au prochain épisode…



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